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samedi 18 janvier 2014

Apprendre, c'est chouette !


Hier au service, Mario arrive avec son assistant familial (Je vous avais déjà parlé de ce petit cuisinier en herbe qui m'avais montré qu'à 5 ans, il savait déjà comment faire une soupe). Vu que Mario est arrivé en avance, j'ai du m'occuper de lui pendant 2 heure. Au menu, jeu avec des voitures aimantées qui se déboîtent. Il y en a cinq qui tombent par terre et il faut les remonter :

-Rhooo Mario, regarde, les voitures sont toutes cassées  qu'est-ce qu'on va pouvoir faire ?
-Bah on va les réparer !
-Tu saurais faire ça toi ?
-Bah oui, bien-sûr ! Pourquoi toi tu saurais pas ?
-Non, je ne crois pas, montre moi comment tu fais !
-Rhooo mais toi alors ! A part taper sur ton ordinateur, tu sais rien faire ! (Hum hum hum)
-Bah tu as raison, mais je sais quand même un peu être avec toi non ?
-Oui, c'est vrai, j'aime bien être avec toi parce qu'au moins je ne m'ennuie pas (*sifflote*)

Un peu plus tard, nous jouons une nouvelle fois avec la dînette. Mais un imprévu "pour de vrai" s'est glissé dans un jeu "pour de faux". Cet imprévu, c'est une part de galette des rois qui a commencé son existence dans l’assiette (dînette) de Mario.

-Ahhh Mario, avant de commencer à manger, il faut aller se laver les mains !
-AH bon, c'est vrai ?
-Bien oui, c'est quand même mieux d'avoir les mains propres pour manger, qu'est-ce que tu en pense ?
-Oui, tu as raison. Mais on va se laver les mains pour de vrai ou pour de faux ?
-La galette est elle est vraie ! Alors que fait-on ?
-Hummmmm POUR DE VRAI !
-Ok, allez vient nous alors nous laver les mains à la salle de bains.
Mario part en courent et scande dans le service : "Je vais ma laver les mains pour de vrai, Je vais ma laver les mains pour de vrai, Je vais ma laver les mains pour de vrai, Je vais ma laver les mains pour de vrai, Je vais ma laver les mains pour de vrai !

Hum, il fait du bruit mais il est mignon hein ;)

Après avoir fini la galette :

-Mario, l'assiette est sale, il faut aller la laver, qu'en pense-tu ?
-AH bin oui alors, elle est toute collante !
-Est-ce que tu as envie que nous le fassions ensemble ?
-Oh oui, je VEUX faire la vaisselle !

Et c'est reparti pour un tour direction la cuisine avec un Mario qui scande : "Je vais faire la VASSELLEUH, Je vais faire la VASSELLEUH, Je vais faire la VASSELLEUH, Je vais faire la VASSELLEUH, Je vais faire la VASSELLEUH !

Hum, bon le truc c'est qu'il a voulu une autre part de galette mais que la conséquence de devoir faire la vaisselle ensuite ne posait pas problème pour lui, bien au contraire ! Vu qu'il était quand même bien agité au bout d'un moment, il a bien voulu faire un dessin pour moi dans une pièce à part. Bref, pour un enfant "hyper-actif" il a été plutôt sage

Autre situation qui s'est déroulée un peu avant :


Celle-ci m'a permise de mettre en application l'idée de l'appropriation d'un choix d'une enfant (qui voulait tout pour elle) dans le cadre d'une prévention de conflit. C'est une enfant de 7 ans qui a déjà décompensé et qui donc, risque fort d'être orientée vers une prise en charge spécialisée dans le champ du handicap mental (Elle peut être très violente et le chef de service ne m'avais pas permis de l'accompagner en amont) . Donc dans cette situation, prévention de conflit entre Mario, Sabine et moi. Sabine était venue dans le service pour une "visite médiatisée" avec son père. Tout deux allaient donc occuper la salle de jeu. Mario voulait prendre un meuble jouet qui sert de four et de plaque chauffante. Sauf que le meuble était encombrant, lourd et de plus Sabine le voulait pour "elle toute seule". Heureusement, il y avait deux petites plaques portatives que je comptait prendre pour jouer avec Mario dans un bureau à l'autre bout du service.

Mario :
Je veux prendre le four, on va en avoir besoin !
Sabine : Non, il est pour moi, je ne veux pas que tu le prenne !
Moi : Le four est lourd Mario, tu crois que tu saurais le transporter jusque dans le bureau du fond ?

(Il essaye)

- Non, il est trop lourd !
-Et si on prenait plutôt cette petite plaque chauffante portative ?
-Ok, on la prend !
Sabine : Nooooon je la veux, il n'est pas question que vous la preniez !
Moi : Sabine, nous devons en prendre une des deux, préfère tu garder le four ou la plaque chauffante ?
Sabine : Je préfère garder le four ! (Normal, il est plus gros^^)

Pfiouuuuu, pour le coup, entre la plaque chauffante et le four, on va dire que j'ai eu chaud !

vendredi 13 décembre 2013

Mais tu sais, je t'aime bien !

16h30 dans le service. Pour poser le contexte. Le service, c'est des bureaux avec une salle de réunion...

Une dizaine d'enfants qui déboulent les uns après les autres.
Le premier arrive, je lui dis :
Bonjour X (6ans), alors tu veux jouer un peu ?
-Ah bin oui alors !
-Que veux tu faire ?
-Je veux jouer à faire la cuisine !
-Et que veux tu préparer ?
-Je veux faire de la soupe !
-Très bien, que veux tu mettre dans ta soupe ?
-Des épinards
-Et quoi d'autre ?
-Des épinards épicétou...
-D'accord, de quoi avons nous besoin pour faire une soupe ?
-Mais t'es vraiment trop bête toi hein, il faut des épinards, une casserole, de l'eau, du sel et un robot mixeur...
WTF, et c'est moi qui suis sensé être éducateur

Une autre ? :

Je suis derrière mon ordi en train de taper un rapport d'intervention lorsqu'une petite fille vient me voir pour me demander :
Dis toi, comment tu t'appelle ?
-Je m'appelle Marc.
-Dis, je veux faire un coloriage, tu peux me trouver un coloriage de "Hello Kitty" ?
-Oui, je peux le trouver mais au fait, comment tu t'appelle ?
-Je m'appelle Mélodie !
-Tu t'appelle Hello Kitty ! Mais c'est toi que je vois dessiné partout, c'est ton nom que je vois écris partout, tu es célèbre dis donc !
-Moooaiiiis non, t'es trop bêêêête twaaa, je m'appelle Mélodie, mais tu sais, je t'aime bien...

C'est pourtant si facile !

mardi 19 novembre 2013

Me revoici !

Bon, je sais ce n'est pas bien de ne pas donner de nouvelles mais vu que ce blog n'était pas très fréquenté et que les commentaires ne sont pas venus orner les bas de page, je me suis donc dis que je pouvais un peu partir en vacances poursuivre ma formation et travailler pour développer une posture professionnelle.

En fait, cela n'a pas duré longtemps, sitôt le DEAMP reçu, j'ai travaillé durant deux mois dans un FO. J'écrirai sûrement quelques situations que j'y ai rencontré, des bonnes et des moins bonnes. Donc, deux mois de travail, une semaine de vacances et me voila reparti pour deux années de formation objectif DEME (Diplôme d’État de Moniteur Éducateur). 

Mon impression de la promo à ce jour ? Ce n'est pas le même niveau, ça se sent tout de suite. Donc les AMP qui souhaiteraient rempiler dans cette voie et qui ont été en difficulté sur l'ensemble de la formation DEAMP, vous êtes prévenus. Toutefois vous avez toujours mes sincères encouragements si votre cœur y est !

J'ai choisis mon premier stage dans un service d'enfants placés soit en famille d'accueil, soit en MECS soit avec un soutient éducatif à domicile.

C'est un stage de bureau et je m'y ennuie, je dois bien le dire. Peu de contacts avec les usagers, beaucoup de paperasse et de travail avec les partenaires (Juge, ASE, MSD, CMP, Écoles, collège etc..).

Une chose est sûre, ce service n'est pas fait pour moi bien qu'il soit hyper enrichissant au niveau de la formation.

Bon, voila, il est 23h30, je vais me coucher mais avant je publie ce billet pour les yeux qui traîneront dans le coin ;)

lundi 20 mai 2013

Prise de fonction d'AMP dans une résidence collective

Lorsque je suis entré sur mon deuxième lieu de stage, un autre AMP -qui d'ailleurs était aussi formateur de mon institut - est entré en même temps que moi. Rétroactivement, je me suis aperçu que nous ne sommes pas du tout entrés en poste avec le même positionnement.

Au tout début,  comme n'importe qui, j'avais des appréhensions ! Venant précédemment d'un stage en EHPAD, j'avais peur de ne pas parvenir à établir de relation avec les résidents, de ne pas savoir poser les limites nécessaires pour qu'ils me respectent et se respectent entre eux... De ne pas savoir gérer les conflits et la dynamique de groupe.

Dans un premier temps donc, je pensais que pour gagner leur confiance, il me fallait établir une relation. Connaître leur dossiers. Mais dans cette expérience, je me suis très vite heurté à un mur vu qu'il n'y avait pas beaucoup de sujet de conversation avec certains d'entre eux.

Alors que j’essayais péniblement d'établir une relation, l'autre AMP quant à elle s'engouffra dans la lingerie, pour les aider à faire leur lessives, dans leur chambre pour les stimuler à la toilette, au ménage etc...Ainsi, cet AMP gagna leur confiance plus rapidement. Le relationnel pu aussi s'établir plus efficacement en s'articulant sur le support de l'accompagnement lors d'un temps clé. Le support étant la lessive par exemple.

En langage technique, nous appelons cela "la tiers médiation". La médiation d'un accompagnement comme support à la relation. Il se trouve que cela fait parti de notre DF4 "Savoir utiliser le soin et les activités quotidiennes comme support à la relation et la relation comme aide à leur réalisation."

Un phrase qui est resté asses mystérieuse pour moi au moment de mon éval' sur le terrain du premier lieu de stage.

Faire ainsi, permet aussi de d'évaluer les aptitudes concrètement, mettant en évidence les difficultés rencontrées. Ainsi, la lecture des dossiers devient moins abstraite et théorique.

Donc, prise de fonction = Fiche de poste et direction quotidien et temps clé. ;)

vendredi 23 novembre 2012

La sexualité dans le domaine du handicap pour un croyant.

Bonjour a vous, J'ai récemment reçu des remarques intéressantes sur mon deuxième lieu de stage dans le champ du handicap. La question portait sur la compatibilité de ma foi d'avec l'accompagnement dans la sexualité de personnes adultes handicapées. J'ai bien évidement répondu que je ne voyais -en ce qui me concerne- aucun problème à accompagner des personnes déficientes ou psychotiques dans une sexualité régulée par des moyens de contraception. Toutefois il m'a tout de même fallu approfondir cette question plus avant et c'est ainsi que j'ai proposé cette question sur le forum de la cité catholique. L'épouse de Gyrovague m'a gentiment répondu en portant à ma connaissance les écrits de Jean Vanier.
 
J'ai donc commencé la lecture de "Homme et Femme Dieu les fit" et j'en ressors complètement bouleversé. J'y ai bien évidement trouvé des réponses mais aussi des pistes d'accompagnements bien plus poussées que je ne l'aurait imaginé. Notamment des réponses philosophiques et psychologique dans l'accompagnement de la sexualité. Certains d'entre eux se trouvent couronnés de succès et d'autres pas.
 
Il ressort de cette lecture que la contraception dans le domaine du handicap ne pose pas de problème pour un accompagnant chrétien et même l'homosexualité des résidents peut être accompagné ! Comme le précise Jean Vanier à la page 12 :
 
"Dans ce livre, il est question des relations entre hommes et femmes. J'ai choisi de ne pas aborder ce qui touche à l'orientation homosexuelle. Nous sommes tous frères et soeurs devant Dieu, mais l'orientation homosexuelle est quelque chose de différent. La personne doit être respectée dans sa différence et accompagnée comme tout un chacun pour devenir la plus humaine possible."
 
Quelles sont les réponses qui nous permettent d'admettre la contraception dans le domaine du handicap ?
 
Tout simplement que les personnes accompagnées doivent disposer d'un consentement éclairé sur la question des accompagnements qui leur sont propres (cf. Loi 2002-2). Le discours chrétien n'est pas différent ! C'est par un libre choix éclairé que nous accepterons ou pas le Christ à l'heure de la mort.
 
Nous ne pouvons pas demander aux personnes d'aller au delà de leur limites et il nous faut respecter et accompagner les limites des personnes.Les personnes souffrant de handicaps mentaux et de troubles associés ont pour la plupart fait une expérience douloureuse de la vie relationnelle étant enfant. Ces expériences peuvent également se prolonger vers l'âge adulte et renforcer la muraille qui les sépare d'une véritable vie sociale et/ou communautaire.
 
Pour comprendre la position de l'Église catholique en matière de contraception il nous faut premièrement nous poser des question philosophiques sur ce qu'est la vie. La vie, nous a produit, elle produit également tous le vivant. Nous sommes le prolongement de ce qui nous a précédé et cela remonte à l'aube des temps. C'est ici que nous pouvons considérer le caractère infiniment précieux et rare de ce que nous sommes. Nous avons une seule chance sur 39 millions que le bon spermatozoïde vienne féconder l'ovule et faire de nous ce que nous sommes. Si nous considérons cela au regard des 1 chance sur 39 millions de nos parents, grand parents etc... Combien y a-t-il au final de chance pour que vous existiez ? Les chances sont tellement infimes que cela fait de nous : Un miracle.
 
La vie nous a fait naître et la contraception barre la route à la vie. Il s'en suit des comportements désordonnés dans la vie relationnelle. Nous voulons de l'autre sexuellement mais pas comme si c'était une personne. Nous ne sommes pas prêt à assumer la responsabilité d'une naissance. Nous ne voulons tout simplement pas accueillir la vie de l'autre et qui nous a vu naître un jour. Nous prenons la vie comme un du et ne donnons rien en retour. Nous ne voulons que notre plaisir personnel. Nous jouissons contre nous même et notre nature profonde faite pour la vie relationnelle amoureuse dans toutes les dimensions de notre être. Sans quoi, l'autre devient un "moyen" de plaisir et n'est plus considéré comme une personne. Nous ne lui offrons pas l'entièreté de nous même et nous ne voulons pas de son entièreté. Pour approfondir cette question lire l'encyclique Humanae Vitae de Paul VI.Vous pourrez également lire le témoignage passionnant de Natalia Trouiller qui ne "coupe pas les cheveux en quatre".
 
Le Magistère de l'Église précise de plus que  : "Pour former un jugement équitable sur la responsabilité morale des sujets et pour orienter l'action pastorale, on tiendra compte de l'immaturité affective, de la force des habitudes contractées, de l'état d'angoisse ou des autres facteurs psychiques ou sociaux qui amoindrissent voire exténuent la culpabilité morale". (CEC 2352-2354)
 
Nous comprenons donc au final que les personnes handicapées souffrent de troubles relationnels. Qu'a cause de la contraception elles ne peuvent approfondir le mystère de l'amour et de l'accueil de la vie au sein de la relation de personne à personne. C'est ce que déclare Jean Vanier dans le livre cité plus haut à la page 214 et 215 :
 
"Beaucoup de parents sont inquiets (..) de la permissivité sexuelle qui s'est propagé dans certains pays. Je connais, dans certaines institutions, des équipes éducatives qui prétendent agir pour le bien être et la libération des personnes handicapées; croient, sans se poser de question, qu'il faut encourager les relation sexuelles sans discernement, donnant régulièrement des contraceptifs et prônant l'avortement en cas "d'accident" (L'accueil de la vie est elle vraiment un accident ?)."
 
Il n'est bien évidement pas question d'imposer à des personnes handicapés de ne pas prendre des contraceptifs. Mais allons nous jusqu'au bout de l'accompagnement des personnes en les leur imposants ? Ne peuvent-ils avoir la possibilité d'avoir une vie amoureuse relationnelle (qui contribue à leur libération, leur bien être) et être progressivement introduite sur la finalité de la sexualité ? Nous pourrions même aller jusqu'à sortir la loi 2002-2 qui stipule clairement que les personnes doivent avoir accès à l'information, Quelle doivent être bénéficiaire d'une "prise en charge ou accompagnement individualisé et de qualité, respectant un consentement éclairé."
 
 
En conclusion, nous ne pouvons pas demander aux personnes d'aller au delà des limites qui sont les leurs, toutefois notre travail éducatif ne doit pas s'arrêter ici. Il s'agit d'accompagner les personnes, dans leur vie de couple, de les informer sur la sexualité et l'accueil de la vie qui peut en découler. De remettre entre leur mains le libre choix éclairé de la contraception ou non.
 
A final, je ne vois donc pas de problème pour accompagner dans la vie relationnelle et sexuelle des personnes handicapées tout en étant catholique.
 
Ci-dessous, l'interview de Jean Vanier sur KTO : http://www.youtube.com/watch?v=yfw0QnGHtFs&feature=relmfu

lundi 24 septembre 2012

La mort, le deuil et l'accompagnement.

Lors de ma formation, j'ai effectué mon premier stage dans un Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées et Dépendantes (EHPAD). Moi qui n'avait jusqu’alors accompagné qu'un jeune enfant TED (trouble envahissant de développement), j'avais alors beaucoup d'idées préconçues sur le métier et j’eus beaucoup de mal à trouver mon positionnement. Ce qui m’effrayait le plus et qui fut l'objet de ma soutenance était : "La distance professionnelle".

Serais-je trop distant ? Trop proche ? Comment allais-je m'en sortir avec cette histoire alors que mon travail est un travail dit de "proximité" et "d’accompagnement dans les actes de la vie quotidienne" ? Et la mort, le deuil, comment allais-je gérer cela ?

Lors de ce stage, il y avait une dame qui souffrait de "démence sénile". Je n'ai pas remarqué de troubles de la mémoire de type Alzheimer. C'est à dire qu'elle se souvenait très bien de moi, de mon prénom et qu'elle avait pris l'habitude que je l'accompagne et je l'ai fais durant toute la durée de mon stage. J'ai également fais plusieurs "études de situations" sur l'accompagnement effectué auprès d'elle. Je vous livre la première et des extraits des suivantes pour en arriver au vif du sujet : "Le deuil".

"Par soucis d’anonymat je donnerai à cette personne le pseudonyme de « Jeanne » afin de rester en conformité d’avec la loi du 2002-2 qui précise que « Toute donnée concernant l'usager doit rester confidentielle».
Je suis entré en contact avec Jeanne pour la première fois il y a quatre jours. Avec mon AMP référent, nous étions en train de réveiller les résidents aux alentours de 7h30 du matin. Entré dans sa chambre elle criait « au secours, au secours », je m’empressais auprès d’elle afin de savoir ce qui se passait, elle avait fait un cauchemar et semblait ne pas parvenir à dissocier le rêve de la réalité. Je la rassurais donc en lui disant « tout va bien ne vous inquiétez pas, ce n’était qu’un cauchemar, nous sommes là ».
Jeanne appartient au GIR 1 et toutes ses variables du groupe GIR sont dans le « C ». C'est-à-dire qu’elle souffre d’une perte d’autonomie totale : Elle ne fait ni spontanément, ni totalement, habituellement, ni correctement, les actes de la vie quotidienne tels que : La toilette, l’habillage l’alimentation l’élimination les transferts (se lever, se coucher, s'asseoir) les déplacements à l'intérieur et à l'extérieur. Elle éprouve également des difficultés pour communiquer à distance, elle a des moments d’incohérence et souffre d’une perte du sens de l’orientation. Elle est toutefois capable d’utiliser la sonnette d’alarme qui se trouve dans sa chambre.
Le médecin l’a diagnostiqué de « démence sénile » qui est « Un affaiblissement psychique progressif et global ». En effet il lui arrive d’avoir des hallucinations, de voir des souris qui dansent dans sa chambre, ou alors des éléphants d’Asie qui la traverse chevauché par des indous, ou encore de croire être dans un « bordel » ou un « repaire mafieux ». Il me semble à la vu du diagnostique et de mes observations, qu’elle est en « perte totale de repaires concrets ».
Elle communique bien verbalement mais il faut bien se rapprocher d’elle car de loin, l’expression verbale est inaudible. Elle communique aussi de façon non verbale avec des expressions du regard, des mimiques du visage et elle aime que nous lui prenions la main et le réclame spontanément asses souvent d’ailleurs.
Elle a de mauvais rapports avec la plupart personnel soignant et lorsque c’est le cas elle les injurie alors qu’ils lui font la toilette, lui donne à manger, la transporte au salon ou dans sa chambre etc… Il lui arrive aussi de vouloir –car au vu de son étant physique cela n’est pas possible- être violente physiquement et de tenter de frapper le personnel qui ne lui convient pas tout en l’insultant et lui reprochant de ne pas être suffisamment compétent.
Socialement elle est isolée et le peu de famille qui lui reste ne lui rend pas visite car « ils habitent trop loin » m’a-t-elle dit. Après la toilette et le petit déjeuné, elle passe sa matinée dans le salon devant le poste de télévision en compagnie des autres résidents. L’après midi elle reste seule dans sa chambre et n’a plus le désir de participer aux animations.
Je me suis souvent occupé d’elle ces derniers jours et j’ai réussis à avoir de bons rapports. C’est une personne qui a besoin de beaucoup d’écoute et elle a souvent besoin d’être rassurée. Par exemple, lors des repas elle croit toujours que nous lui mettons des médicaments dans les aliments à son insu, ou que des membres du personnel lui volent ses bijoux. Elle aime que nous soyons prévenant, que nous verbalisons ce que nous allons faire et que nous lui expliquons afin qu’elle soit collaboratrice des actions auxquelles nous l’assistons."
Étude N°2 (extrait)

"Elle a des pertes de mémoire, des absences, des hallucinations très fortes, hier, alors que je l'accompagnais au repas, elle se croyait attaquée par des gangsters tout droit sorti du poste de télévision qu’elle prenait pour une fenêtre. Elle trouvait que ma façon de taper à répétition ma cuillère à soupe dans l’assiette était une façon efficace d’appeler « police secours »."
On comprends aisément qu'il est très difficile d'accompagner cette personne tant la réalité lui apparaît comme faussée.

C'est pourtant avec cette personne que j'ai eu  le rapport le plus réel avec notre réalité ultime : "La mort". C'est alors que je l'accompagnais aux toilettes que "Jeanne" nous regardait un autre AMP et moi même tristement. Je voyais bien que quelque chose n'allait pas et j'eus le sentiment de savoir de quoi il était question. Je lui posais alors la question "quelque chose ne va pas Madame Jeanne ?" elle me répondit : "J'ai peur, j'ai peur, j'ai peur...". "De quoi avez vous peur" lui répondis-je ?" 

"J'ai peur de mourir..."

Elle était en larmes, et j'avoue que nous aussi nous l'étions intérieurement.  Heureusement, à ce moment du stage, j'avais pris de l’assurance et j'avais appris ce qu'il ne fallait pas dire. Toutefois, j'ignorais ce qu'il fallait dire. Pourtant c'est tout naturellement que ces mots sont sortis de ma bouche :

"Vous n'êtes pas seule, rassurez vous, nous ne vous abandonnerons pas, nous sommes avec vous, nous vous accompagnons". Loin de réduire le réalisme de la situation de cette dame, il fallait au contraire entrer en concordance avec celui-ci en ne minimisant rien mais en la soutenant.

Le soir même, alors que j'accompagnais "Jeanne" lors de son repas, elle riait, elle chantait à tue tête "Nam-myoho-renge-kyo, Nam-myoho-renge-kyo" en boucle. Il est question d'une prière bouddhiste. Bref, Jeanne était heureuse, libérée de la charge anxiogène de sa peur. 

***

Notre travail est d'accompagner les personnes dans le deuil d'elles même. Le deuil ? C'est "la perte de l'objet aimé" selon Freud. Cela peut être des clés de voitures,  la voiture, le boulot, le conjoint, voire une bouteille de bière maladroitement tombé de nos mains alors que nous n'en avions bu qu'une gorgée.

La première phase : Le choc, de déni.

"Ah [Bip], c'est pas possible, je n'y crois pas, ma bièèèèère" (et mes chaussures)

Deuxième phase:  la colère.


"Je suis vraiment un [bip] et toi ? T'as même pas été [bip] de rattraper cette [bip] de bière ?"

Troisième phase : La négociation.

"Bon tu crois qu'on peut aller en chercher une autre? Le magasin est encore ouvert ?"

Quatrième phase : L'acceptation.

"Bon, il est fermé, pfff, ok c'est pas grave."

Il fallait bien détendre un peu l'atmosphère avant de revenir à notre sujet difficile. Notre travail est d'amener les personnes à accepter le fait qu'elles vont mourir, Hé oui, je sais c'est pas drôle et on a tendance à freiner des quatre fers dans l'accompagnement de cette réalité. Mais si nous voulons faire notre travail au mieux, il nous faut accompagner ces personnes dans ce processus de deuil d'elles même et les conduire à l'acceptation qui en est la dernière phase.

Comment faire ? On ne peut pas aborder le sujet comme ça, il faut amener les personnes à nous en parler. Les personnes âgées savent très bien qu'elle vont mourir. Ce qu'il faut, c'est les mettre en confiance, les soutenir, avoir de l'empathie pour elles. Bref, il faut être authentique. Ahhh et la "distance professionnelle" me direz vous ? Et bien la "distance" ça vaut que dalle, ça n'existe pas, et si ça existe et bien on ne fait pas notre métier correctement. La seule chose qu'il nous faut faire, c'est prendre garde à notre "projections" et à nos "transfert". En parler en équipe permet de prendre de la distance, faire des écrits également, suggérer un "groupe de parole" à la direction qui pourrait figurer dans le "projet d'établissement" si il n'y figure pas déjà. 

Astuce : Pour accompagner les personnes dans le deuil? Leur poser des questions détournées : Avez vous bien dormi ? Avez vous fais des rêves ? Pourquoi n'arrivez vous pas à dormir ? A quoi pensez vous ? Voulez vous que nous en parlions ? 

En effet, la peur de la mort, se manifeste la plupart du temps, le soir et pendant la nuit. Faire attention aux transmissions de l'équipe de nuit et questionner.